Communiquer
La communication est un processus dynamique. L'échange des messages dans une conversation mobilisent activement les interlocuteurs.
Ce qui est en jeu : observer, comprendre les mots, et ce qui est dit entre les mots, analyser tous les paramètres qui sont associés à travers le code du langage et à travers les codes non verbaux.
Cette situation -simple au premier abord- est en réalité une construction très fine. Elle doit aboutir à assembler tous ces éléments pour leur donner du sens.
Pour l'émetteur, il faut amener un interlocuteur à recevoir et à partager son propre espace de pensée. Pour l'auditeur il faut rester au plus près de l'intention de celui qui propose son idée.
Le sens se négocie, la relation se défait et se refait sans cesse. Il ne faut déduire au plus juste, donner à comprendre précisément notre idée, nos représentations, il ne faut pas se perdre, rester dans la relation, choisir sa place, la maintenir, savoir où se situe notre interlocuteur, avoir une idée précise de sa position, l'amener sur notre terrain, le convaincre, l'influencer ... les enjeux sont nombreux. Les partenaires sont tour à tour, et simultanément, émetteur et récepteur d'un contenu verbal et non verbal partagé.
Communiquer met donc en relation deux systèmes de pensée qui s'ajustent à travers des analyses et des ajustements subtils, conjoints et simultanés. Entre les protagonistes s'établit une « construction, qui est plutôt une co-construction de sens, [qui] s’étaye sur une dynamique relationnelle qui met aux prises deux appareils cognitifs incarnés et situés socialement et qui constitue le lieu de l’inter-compréhension ... (1) »
Le handicap de communication altère profondément la relation à l'autre, la relation à l'environnement, la dynamique de guérison.
Maintenir une communication est une urgence. En contournant le handicap, en ouvrant le canal, en passant par l'image, en bousculant le code, en négociant avec l'aphasie, en se décalant du langage, en priorisant ce qui reste encore dans le champ des compétences.
La personne aphasique ne prendra pas spontanément ce chemin. Elle passera en priorité par le langage, en se focalisant sur la mise en forme de sa parole : "communi-centrée", "encapsulée" dans les déficiences de son langage, et s'écartant de la relation à l'autre.
Nous avons, nous, interlocuteur dont le système de communication est intact, les compétences pour ouvrir un autre process de communication : pour contourner l'aphasie aidons la personne aphasique !
1. BRASSAC Ch. Intercompréhension et communi-action In A.-C. Berthoud, L.Mondada Ed, Modèles du discours en confrontation. Berne, Peter Lang, 2000 ; 219-228